Course à pied, intensité et volume d’entrainement ?!
La course à pied est une activité plébiscitée dans la population, notamment en raison des bénéfices qu’elle apporte en termes de santé. Cependant, les arrêts sur blessure sont fréquents. Celles-ci touchent principalement le pied, la jambe ou le genou. Les raisons pour lesquelles ces blessures se développent restent toutefois incertaines.
Des théories mettant en perspective l’aspect quantitatif de l’entraînement et la fréquence des blessures ont été proposées sur la base des données épidémiologiques et biomécaniques disponibles. À cette occasion, les atteintes du genou, telles que le syndrome fémoro-patellaire, le syndrome de l’essuie-glace et la tendinite patellaire, ont été qualifiées de lésions liées au volume, alors que les lésions du pied, telles la tendinopathie d’Achille, la fasciite plantaire ou la lésion des gastrocnémiens, ont été qualifiées d’atteintes liées à l’intensité.
Ces données, si elles étaient vérifiées, permettraient de réaliser une prévention primaire du risque de survenance des blessures. Cette étude randomisée réalisée sur 231 coureurs amateurs s’attache ainsi à confirmer ces hypothèses. Les coureurs ont ainsi été incités à augmenter leur intensité ou leur volume de course. Après 8 semaines d’entraînement ont été recensés 80 participants victimes de blessure. Or, il doit être relevé que ce chiffre ne permet pas de retrouver de différence significative avec le groupe témoin, ce qui est en totale contradiction avec les modèles théoriques précités et les études antérieures conduites.
Positionnement
Cette étude permet de mettre en lumière deux éléments spécifiques de la recherche clinique. La première est marquée par l’incertitude et les discussions de résultats inhérentes à la recherche, ainsi que le non-dogmatique des études. Une étude n’établit aucunement la vérité et n’est valable que dans un contexte considéré.
Le second élément oblige à conserver à l’esprit que chaque élément constitutif de l’étude doit irrémédiablement être appréhendé en considération de l’ensemble. Ainsi convient-il de s’attacher à lire les études en entier et s’interdire de n’apprécier que les résumés. Une parfaite illustration de ce propos apparaît à la lecture de cette étude, qui comporte des biais importants. À ce titre, il peut être lu que l’étude porte sur une population de 231 coureurs, sans que ne soit mentionné dans le corps du résumé que de 839 coureurs ont été inclus à l’origine. Une perte d’effectif de prés de 70 % permet alors probablement d’expliquer les différences observées.
Dans notre formation ITMP, nous avons à cœur de défendre ce regard critique à l’égard de la littérature scientifique et insistons continuellement sur le sens clinique, qui apparaît désormais prépondérant dans l’exercice de notre profession.
Article original
Le développement de pathologies spécifiques chez le sportif amateur à l’aune de la progression de l’intensité ou le volume de course : un essai randomisé relatif aux différents risques présentés
Progression in Running Intensity or Running Volume and the Development of Specific Injuries in Recreational Runners: Run Clever, a Randomized Trial Using Competing Risks.
Ramskov D, Rasmussen S, Sørensen H, Parner ET, Lind M, Nielsen R.J Orthop Sports Phys Ther. 2018 Oct;48(10):740-748. doi : 10.2519/jospt.2018.8062. Epub 2018 Jun 12.
Pour la pratique
L’augmentation de l’entraînement ne majore pas les blessures.
L’intensité et le volume d’entraînement ne semblent pas influer sur le risque de blessure.